Avec le Mat à Compostelle
....Récit....

Le Mat, Icône de Saint-Roch

Comme annoncé dans le chapitre précédant, la ressemblance étonnante entre Saint-Roch et le Mat du Tarot de Marseille m’ont incité à faire des recherches afin de mieux comprendre le lien, s’il en existe un, et donc de mieux connaître ce Mat, si libre et pourtant si déterminé et fidèle à la fois.

 L’hypothèse de départ est que Saint-Roch et le Mat n’ont aucun lien ; Ce ne sont que la tenue vestimentaire de l’époque, les accessoires et le hasard qui créent le lien entre eux. Je débute donc ma recherche dans les écrits se référant aux saints chrétiens en général ainsi que leur patronage.

 Au départ, les similitudes ne sont que des clins d’œil sans grande importance, mais au fur et à mesure que progresse ma recherche, le nombre de clins d’oeil apparemment anodin évolue tellement qu’il devient difficile de ne voir que du hasard dans les ressemblances.

J’ai retenu ici 4 clins d’œil, mais ce sont les similitudes que nous découvrirons plus bas qui font du Mat une Icône de St Roch.

 Un premier clin d’œil m’apparaît à la découverte du jour de célébration de Saint-Roch, le 16 Août ; le 1er jour après l’assomption, juste après la montée de Marie au Ciel. C’est un tout petit clin d’œil, mais ce sont souvent les petits signes qui engendrent l’ouverture à une compréhension plus large.

Ce petit signe me fait penser qu’après le départ de Marie et de son fils, nous restons simples humains face à notre voie, notre destin et nos choix. Orphelin émancipé, l’humain en quête d’amour divin et de spiritualité, peut maintenant suivre son chemin vers sa propre divinité.

 Continuant ma recherche, mon étonnement est grand en constatant la méconnaissance de Saint-Roch parmi les chrétiens. Il n’y a que peu d’écrits, sa vie semble oubliée au point que le chrétien lambda n’en connaît que le patronage, saint guérisseur et patron des pèlerins.

Quelques écrits existent tout de même, mais ceux-ci sont contradictoires sur certains points, dont le lieu de sa mort. Par contre, le sens de ses actions est unanimement similaire.

 Qui était Saint-Roch ? Qu’a-t-il accomplit ?

La première réponse, la plus réactive mais surtout celle que donnerait le Mat est : Sont plus grand accomplissement fut de se réaliser lui-même, d’avoir fait ce que son âme lui inspirait.

 Roch était le fils unique d’une riche famille marchande de Montpellier. Son père, Bourgeois de noble souche, fit fortune dans le commerce d’armement. Par contre, il était un véritable prince dans son comportement et sa diligence, tant envers ses employés qu’avec le peuple en général. Il était, selon les écrits, d’une telle générosité et surtout d’une telle justesse, que tout le monde, sans exception, l’écoutait.

Pour compléter le tableau, celui-ci se prénommait Janus, le dieu au double visage, symbole de la dualité habitant chaque être.

Aurait-il fallu l’inventer que nous ne l’aurions certainement pas imaginé ; Janus, pour un marchand de mort qui se trouve pourtant être vertueux et généreux du fond du cœur.

Voici un 2ème clin d’œil ; de ses racines, de son sang, de son éducation, Roch reçoit en lui tous les possibles de l’Être, l’ombre et la lumière. Le Mat contient en lui tous ces possibles, il peut très facilement et tout aussi rapidement passer de l’anarchie à la réalisation, à l’élévation de l’Être. « De l’ombre vers la lumière ».

3ème clin d’œil au Mat, Janus symbolise la dualité de l’être, mais chez les romains Janus était un Oracle lisant tant le passé que le futur. Le Mat est l’espace temps du Tarot et puisque nous parlons d’oracle, Tarot avez-vous dit ?

 La mère de Roch, qui était originaire de Lombardie, se prénommait « Libérie » et fut aussi nommée « France » par les montpelliérains. Hasard ou synchronicité ? Libérie veut dire « celle qui est libérée » alors que le prénom de France trouve son origine dans les mots « Franche ou Affranchie » « libérée des servitudes ».

Le Mat n’est-il pas libéré des liens terrestres ? N’est-il pas totalement affranchi de toute forme de contrainte terrestre ? Ceci est le 4ème clin d’œil.

Nous découvrirons comment Roch lui-même s’est libéré de toutes attaches matérielles.

 A ce stade, nous savons que Roch a grandi dans une famille harmonieuse, entouré d’amour, de spiritualité et même de responsabilité sociale ou humaine. Sa famille, ses parents bénéficiaient d’une notoriété exceptionnelle : Ils consacrèrent beaucoup de temps et d’argent pour venir en aide aux pauvres, très nombreux en ce 14ème siècle.

Dès son plus jeune âge, Roch avait déjà projeté sa vie au service des indigents et ceci avec le total soutien de son père. Roch consacra toute sa jeunesse à venir en aide aux plus démunis, si bien que lorsqu’il se retrouva orphelin, aux environs de ses 20 ans, sa voie semblait toute tracée.

Avec un tel parcours, il est évident que les biens terrestres ainsi que le pouvoir ne l’intéressaient guère, toutefois, il alla beaucoup plus loin que quiconque dans sa démarche car il l’assuma totalement en la réalisant dans les faits.

Roch vendit l’héritage de sa famille au profit de l’hospice des pauvres. Il conserva juste une petite part de cette fortune qu’il confia à son oncle pour pouvoir revenir plus tard si le besoin devait se présenter, puis il partit en pèlerinage à Rome.

Nous retrouvons là la première vraie similitude permettant un rapprochement symbolique entre Roch et le Mat ;

Tous deux décident de se libérer des liens terrestres pour suivre la voie de leur Âme, leur propre voie.

Le Mat regardant son but spirituel ne se préoccupe pas de ce qu’il foule au pied, les contraintes terrestres sont le dernier de ses soucis, il ne voit que son but.

 Parti sur les chemins de Rome, il œuvra comme guérisseur car il avait le don de soigner les plaies et les douleurs. Lui-même se blessa durant son voyage et il guérit sa blessure avec ses mains et ses prières.

Autre point commun entre Roch et le Mat, la blessure. Saint-Roch est toujours représenté montrant une blessure sur sa jambe dénudée. Le Mat laisse apparaître un pantalon déchiré et une lumière vive jaillissante d’une ouverture, (de la blessure). Le lien entre la déchirure et une ouverture dans la chair se retrouvera plus tard.

 A Rome la peste sévissait, si bien que Roch soigna les pestiférés durant 2 longues années allant jusqu’au point de contracter lui-même la maladie.

Devant ce cruel constat, il s’isola en forêt pensant ainsi finir ses jours sans risquer de contaminer d’autres gens.

C’est certainement la partie de sa vie qui fit de lui le Saint dont nous parlons ici, le Saint Roch canonisé et invoqué dans les prières de guérison.

 Isolé dans cette forêt, pensant qu’il mourrait rapidement de froid et de faim, il n’en fut rien. En effet, un chien pris Roch en sympathie et des semaines durant lui apporta quotidiennement de la nourriture riche et saine.

Similitude ou hasard ? Le Mat et son chien sont inséparables. Dans tous les Tarots du monde, du plus excentrique au plus traditionaliste, le chien est toujours présent sur la lame. De son coté, Saint Roch est toujours représenté avec son chien, celui-ci étant indissociable de son histoire.

 Ce manège, cette relation, dura un certain temps jusqu’au jour où, le maître s’inquiéta de ce que pouvait bien faire son chien avec les aliments volés quotidiennement sur la table. Il décida donc de le suivre.

Le seigneur Gothard, le maître du chien, en découvrant Roch et sa force spirituelle devint son ami. Après un certain temps, lorsque Roch fut guéri de la peste, Gothard suivit le même chemin. Il se délesta de tous ses biens et devint guérisseur à son tour. C’est d’ailleurs vraisemblablement au seigneur Gothard que l’on doit la biographie la plus proche de Saint Roch. Elle est anonyme mais elle a été écrite par une personne de la région de plaisance, ville où se déroulait l’épisode de Gothard et du Chien.

 La tenue vestimentaire du Mat est celle de l’époque de St Roch. Il est plus difficile de trouver les similitudes vestimentaires car les représentations ont suivi les tendances d’époques en époques.

 Les grelots que le Mat porte sur lui rappelent les coquilles des pèlerins de St Jacques.

 À l’instant de la mort de Roch, son geôlier affirme avoir vu une lumière aveuglante jaillir de sa cellule. (La même lumière qu’à la mort du Christ).
De la déchirure symbolisant la blessure sur le coté du pantalon nous voyons une lumière vive fuser de celle-ci

Roch est décédé entre 1375 et 1380 ; Alors que les premières traces écrites du Tarot datent de 1378 en Espagne et 1379 à Venise. Rien à voir ! diront certains, pourtant, quand l'Univers a quelque chose à dire, il n'utilise pas la voie la plus humainement logique. les voies du symbolisme et de la synchronisité sont son langage favori.

 Dans le Tarot, le Mat va à Compostelle, l’inclinaison de son bâton l’indique. Sur les chemins de Compostelle, la traversée du massif central est presque entièrement dédiée à St Roch.

 Toutes ces similitudes prises indépendamment l’une de l’autre peuvent paraître bien anodines, mais l’accumulation de ces indices associée au fait que le Tarot parle du même cheminement que celui proposé par l’église, il est difficile de ne pas y voir "le sujet" et "l’icône".      

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